MIRAGE III V
une brillante impasse

BALBUTIEMENTS
à l'étranger
chez Dassault

LES MIRAGE III V
collaborations
à la recherche d'un moteur
premiers vols
premiers succès
fin du programme
 
 
 

L'avènement du turboréacteur avait doté les nouveaux avions de combat de performances
exceptionnelles. Mais les stratèges eurent rapidement quelques craintes quant à la vulnérabilité des
très longues pistes en dur nécessaires à leur mise en œuvre. Dès la fin des années quarante, on
commença à travailler sur des projets d'avions de combat ADAC/ADAV (avion à décollage court,
ou vertical, V/STOL en anglais).

BALBUTIEMENTS

Les ADAC/ADAV ont eu leur part dans la prolifération de projets et prototypes étudiés à partir de
1945 par l'industrie aéronautique française renaissante. Deux prototypes furent construits :

Le "Coléoptère" : conçu par la SNECMA, le Coléoptère devait voler grâce à une aile
                            annulaire entourant un réacteur ATAR. Cet engin pour le moins original
                            s'écrasera lors de sa première tentative de passage en vol horizontal et restera
                            sans suite.
 

L' ATAR volant : sorte de chalumeau volant, ce proto permit de valider le système de
                            contrôle d'un avion en phase de sustentation par des jets d'air comprimé.
                            Ce dispositif sera plus tard repris sur les Mirage III V et fait encore les beaux
                            jours des  Harrier Britanniques.
 

A L’ETRANGER :

Royaume uni :

Les anglais  de chez  Short avaient testé en 1960 le SC-1, propulsé par 5 réacteurs Rolls Royce RB 108, dont un seul servait à la propulsion, les autres assuraient la sustentation ; inutile de préciser que les performances n’étaient pas faramineuses, Short devait vite abandonner cette voie. Chez Hawker, on travaillait sur une toute autre option, celle d’un avion bâti autour d’un réacteur à double flux et à tuyères orientables capables d’assurer à la fois la sustentation et la translation, le Bristol « Pegasus ». Cette étude donna le jour au prototype P-1127, qui est l’ancêtre du seul ADAV à avoir connu le succès : le Hawker « Harrier ».
 

Etats Unis :

Les USA ont sérieusement étudié le concept ADAV. Plusieurs prototypes ont été construits, et ont volé avec plus ou moins de bonheur : le Ryan verti jet, et le Convair XFY-1 « Pogo ». Finalement, les seuls VTOL à entrer en service actif aus USA seront des Harrier construits par Mac Donnell Douglas, et adaptés aux besoins de l’US Marine Corp.

CHEZ DASSAULT :

Dassault étudie comme tout le monde des avions ADAV. Le premier dessin connu porte le nom de MD 610 « cavalier », il est bâti sur le même concept que le Harrier. Cependant, l’armée de l’air et l’OTAN veulent un appareil supersonique, et les moteur du type « pegasus » ont des handicaps rédhibitoires pour atteindre ces vitesses : diamètre important de la soufflante, impossibilité d’adapter une post combustion aux tuyères orientables.
Fidèle à son habitude qui est de baser une avancée technique sur un concept éprouvé, Dassault choisit de partir du Mirage III, dont la formule aérodynamique a fait ses preuves. C’est le mirage IIIA 001 qui va reprendre du service, son fuselage est reconstruit pour pouvoir y loger huit réacteurs RB 108 destinée à assurer la sustentation de ce nouvel appareil de 6.7t.
Afin de faire un peu de place dans le fuselage, l’ATAR 9 est remplacé par un Bristol Siddeley Orphéus de 2200 Kgp (contre 6000Kgp pour un ATAR 9B !), et la taille de guêpe est supprimée. Pour couronner le tout, ces modifications réduisent la capacité en carburant à 1650 l, ce qui laisse au Balzac V 001 une autonomie de ……. 12 minutes.  On l’aura compris, le « Balzac » n’est qu’un avion de transition.


(le balzac V 001)

Il volera pourtant trois ans, effectuant 179 vols avant d’être détruit lors d’un vol d’essais, piloté par le Maj. Neale de l’US Airforce, qui y perdra la vie.
Ce sera la fin d’un avion au destin exceptionnel : commencé comme prototype du Mirage II, il devint en cours de route le démonstrateur du Mirage III, puis le précurseurs des Mirages III V. En effet, même si les dégâts son peu importants, le Balzac ne sera pas réparé : Dassault concentre maintenant tous ses efforts sur les Mirage III V, que l’on veut à l’époque représentatifs des futurs avions de série.

LES MIRAGE  III V :

(le mirage III V01)
 

La variante ADAV du Mirage III fut étudiée pour doter l’armée de l’air d’un avion d’attaque, éventuellement nucléaire, qui ne soit pas tributaire des pistes en dur. Il s’agissait de trouver un remplaçant aux Mirage III E et F 100.
Ce nouveau chasseur-bombardier devait être capable selon le programme officiel de : « attaquer à 500 pieds et 600 nœuds, un objectif situé à 460 Km de son point de départ. Il devait pouvoir emporter pour cela tout un assortiment de roquettes, bombes, missiles air sol, et même une bombe nucléaire Mk VII américaine. La distance de franchissement s’établissait à 2 800 km avec armement, et 4 600 km à vide.

COLLABORATIONS :

Le problème du coût est un obstacle majeur au développement de nouveaux avions de combat en temps de paix. Les performances ADAV et la solution technique retenue (les réacteurs de sustentation séparés), faisaient du Mirage III V un avion très complexe, et donc très cher. Dassault a donc cherché très tôt à intéresser d’autres pays à cet avion. Boeing et L’USAF ont un temps manifesté leur intérêt, pour finalement renoncer en 1964 à ce type d’avion.

A LA RECHERCHE D'UN MOTEUR :

Le devis de poids initial des Mirage III V s’établissait à 12 tonnes, masse bien supérieure à celle qu’aurait pu mettre en mouvement efficacement l’ATAR 9K, le « moulin » français le plus puissant de l’époque. Cette impasse fut résolue grâce à un accord passé entre la SNECMA et Pratt et Withney, qui en échange d’une participation de l’américain de 10.9% dans le capital de SNECMA, donnait au français les licences de construction de tous les réacteurs Pratt. C’est à partir du PW TF-306, que la SNECMA extrapola le réacteur TF-30 qui devint le moteur des mirage III V. Les premiers essais de cette variante montrèrent que l’on avait un peu trop espéré de ce moteur dont la tendance au pompage obérera tout le reste du programme.
La poussée verticale était assurée par huit RR RB 162.

PREMIERS VOLS :

 Ce premier prototype prend l’air à Istres pour la première fois le 24 juillet 1965, piloté par Jean marie Saget. L’avion 02, plus long car destiné à préfigurer la version biplace, suivra dans le courant de 1966. La formule aérodynamique de l’avion étant très connue, les ingénieurs purent se concentrer sur l’étude du vol vertical. Il constatèrent la difficulté de contrôler les mouvement de l’avion pendant les phases de transition.

PREMIERS SUCCES :

Après plusieurs mois d’essais captifs et de décollages normaux, le V01 effectue son premier vol « tout vertical » le 24 mars 1966. Entre-temps, l’avion avait prouvé ses capacités supersoniques en atteignant Mach 1.35. Le 12 septembre le V 02 allait atteindre Mach 2.

FIN DU PROGRAMME :

Dés le début des essais les responsables du programme prirent conscience que les Mirage III V seraient au mieux de brillants avions expérimentaux. Les difficultés rencontrées lors des premiers vols les renforcèrent dans cette conviction, et d’autres solutions furent envisagées pour rendre les avions moins dépendants des pistes en dur :
L ‘aile en flèche (mirage F), ou a géométrie variable (mirage G).
La décision est arrêtée le 28 mars 1966, et communiquée à Dassault : le programme est annulé, toutefois les essais des deux prototypes devaient être poursuivis afin d’amasser un maximum de données sur ce type d’avion.
Les deux Mirage III V continuèrent donc à faire trembler les vitres de des terrains d’Istres et Melun, jusqu’au  28 novembre 1966.
Ce jour là, le V02 effectuait son 24ème vol, le 6ème « tout vertical », piloté par Bernard Ziegler. Au début de la transition, à la 28ème seconde de vol, l’avion subit des oscillations latérales importantes qui amènent le pilote à s’éjecter de son appareil devenu incontrôlable.
C’est la fin des Mirages III V. Le projet fera encore parler de lui en 1972 quand le rapport de la cour des comptes épinglera son coût jugé à l’époque prohibitif (270 millions de francs 1972).