Acquisition
du Mirage IIIC par Israël
Problèmes
initiaux du Mirage IIICJ
Le Mirage IIICJ au
combat
Modernisation
du Mirage IIICJ
Fin de
carrière (1973-1982)
Bibliographie
Acquisition
du Mirage IIIC par Israël
Le petit état d'Israël
est en guerre contre ses voisins depuis le premier jour de son existence.
L'armement de ce qui allait devenir l'une des armées de l'air les
plus prestigieuses de la seconde moitié du 20ème siècle
provenait alors de pays sympathiques à sa cause, entre autre la
France et la Grande-Bretagne, qui y voyaient un moyen de soutenir un état
allié contre les pays arabes (la France pour contrer le soutien
de ces derniers aux rebelles Algériens du FNL, la Grande-Bretagne
pour contrer l'action d'Abdel Nasser et son contrôle du Canal de
Suez). La Hey'l Ha'Avir était donc déjà une cliente
assidue de Marcel Dassault et de Sud-Ouest aviation. Les Ouragan
,
Les Mystère IVA, et lesVautour
II terrifiaient les aviations militaires arabes depuis leur apparition
en 1956. Un peu plus tard le Super-Mystère B2 [baptisé
Sambad] viendra les rejoindre. Ils resteront en service jusque en
1967 et 1973 avant d'être modernisés (l'Ouragan étant
filé pour tirer des missiles air-air, le SMB2
étant remotorisé sous le nom Sa'ar
"tempête" avec un réacteur de A4 Skyhawk. Les Ouragan
seront vendus à l'armée de l'air du Salvador, qui en a remis
2 en service en 1998, tandis que l'armée de l'air du Honduras a
acquis 12 SMB2 modernisés Sa'ar par IAI dont quelques
uns restent opérationnels en 1998, repeint en gris supériorité
aérienne).
À la fin de l'année 1959,
alors que les premiers Mirage IIIA font leur apparition, Israël
envoie en France un de ses prestigieux généraux d'aviation,
Eizer Weizman [commandant en chef de l'Hey'l Ha'Avir de 1958 à 1966].
Dassault propose à Israël de participer au développement
du Mirage. Pour ce faire, l'un des IIIA est mis à la disposition
de l'envoyé personnel du Weizman, Danny Shapira. Pour ce dernier
ce fut, selon ses paroles mêmes, le "Coup-de-foudre" lors de son
premier vol en 1959. Le nom restera et pour les Israéliens le Mirage
IIIC sera toujours le Shachak ("Coup-de-foudre"). Danny Shapira
sera plus tard responsable de la formation des pilotes Honduriens après
l'acquisition des Super-Mystère B2 par
ce pays.
Lors des essais, les performances du
Mirage
III furent notées en tant qu'intercepteur de haute altitude
à grande vitesse ascensionnelle (aidée en cela par la fusée
SEPR). Cependant Israël, bien que toujours satisfaite des appareils
Dassault, cherchait surtout un chasseur de supériorité aérienne
capable de prendre le dessus sur les nouveaux appareils russes fournis
aux pays arabes (en particulier le Mig 21
et le Mig 17, tous deux extrêmement
agiles). Les performances de l'intercepteur devenaient rapidement secondaires.
C'est à Eizer Weizman que l'on
doit l'installation de canons de 30 mm sur le Mirage IIIC. En effet,
alors que la mode du moment était à l'interception au moyen
de missiles à têtes chercheuses, Israël sait par expérience
que l'emport de canons permettait d'obtenir plus de versatilité
d'un appareil (interception, chasse, escorte, attaque au sol etc.) mais
aussi d'assurer la victoire en combat tournoyant qui finissait toujours
par se produire. Les munitions et les canons DEFA
552 occupent la place du réservoir carburant du moteur-fusée
SEPR.
C'est un des particularités
du Mirage IIICJ : il n'était pas équipé pour
recevoir une fusée SEPR. Le gain de poids permet d'allonger l'autonomie
et l'emport d'armement, le Mirage IIIC n'étant pas réputé
pour ses performances en pénétration à longue distance.
Il prendra cependant possession du ciel pour Israël jusqu'à
l'arrivée après 1967 des avions de combats américains
et l'introduction de défenses antiaériennes sophistiquées
entre 1970 et 1973.
De plus les missiles air-air de première
génération sont si peu fiables que c'est avec ses remarquables
canons DEFA de 30 mm que le Mirage
IIICJ emportera une majorité des 285.5 victoires en combat aérien
créditées à cet appareil (une est partagée
avec un F-4E).
En 1960 Israël commande donc 72 monoplaces Mirage IIICJ [photo : monoplace] et 5 biplaces [photo : biplace]Mirage IIIBJ (certaines sources disent 4). Les biplaces israëliens ont la particularité d'être considérés "bons de guerre". En effet, en enlevant le siège arrière, on peut installer deux canons DEFA 552 de 30 mm, tandis que les divers points d'arrimage sous l'avion permettent l'emport d'armement régulier. La seule différence avec le Mirage IIICJ c'est l'absence du radar Cyrano II. Les dates de livraison s'étendront du 4 juillet 1961 et le 22 juillet 1964.
Problèmes
initiaux du Mirage IIICJ
Israël, bien que satisfait des
performances du Mirage IIICJ en général, en a été
aussi l'un des critiques les plus sévères et les plus justes.
Parmi les principaux défauts de l'appareil, selon les dires des
spécialistes israëliens, il faut noter :
Au cours des cinq premières
années de service, le Mirage IIICJ souffrit d'une suite inexpliqué
d'accidents. Six Mirage IIICJ s'écrasent donc, après
un arrêt de fonctionnement du réacteur. Lors du sixième
incident le pilote pris la décision de garder le contrôle
le plus longtemps possible de son appareil afin d'éviter une zone
populeuse. Une fois en position plus stable, décrivant presque une
manoeuvre d'approche régulière, le pilote s'éjecta.
Curieusement le Mirage poursuivit sa route pour finalement se poser
tout seul sur le ventre (en fait sur ses réservoirs d'essence supersoniques,
qui agirent comme des patins) [1].
Les techniciens de l'aviation israélienne purent donc examiner à souhait le Mirage et résoudre l'énigme. À la grande surprise de tous, il apparut que c'était une combinaison de facteurs. Le réacteur Atar 9B ne convenait pas et les canons provoquaient indirectement l'étouffement du réacteur.
Fusion
de la pompe à essence
En haute altitude une partie de la pompe à essence atteignait des températures extrêmes provoquant une fusion du métal et par effet même l'arrêt immédiat du réacteur. Une nouvelle pompe à essence, résistant au climat du Moyen-Orient réglera temporairement le problème.
Introduction
de gaz de tir de canons
Comme le Mirage n'avait pas été prévu à l'origine pour l'installation de canons (surtout positionnés là où ils le sont, soit sous les becs d'amenée d'air) lors du tir les gaz résiduels sont absorbés par le réacteur, provoquant ainsi son étouffement. Ce détail, rédhibitoire pour un monoréacté, qui plus est en situation de combat, sera résolu partiellement par la déviation des gaz. Cependant, lors de longues rafales, le problème persiste et ne sera jamais complètement résolu. Seulement l'adoption du Atar 9C3 (dont les plans manquants furent acquis illégalement par Israël) apportera une solution. La leçon fut retenue et l'une des avenues adoptée par Israël pour ses Kfirs sera d'utiliser un réacteur américain GE J-79 (le même que pour les F-104 et les F-4). Mais c'est une autre histoire ...
Mauvais
alignement des canons
Au cours de plusieurs combats, surtout
pendant les quatre premières années de service, le Mirage
IIICJ manquait régulièrement ses cibles. Des tests révélèrent
deux problèmes distincts : le mauvais alignement des canons et un
défaut de conception des munitions.
Deux pilotes israëliens, exaspérés,
prirent donc les devants en faisant retirer les canons d'un Mirage,
puis en les testant à un banc d'essai. Il apparut rapidement que
la dispersion des obus avait pour effet que ceux-ci passaient de chaque
côté d'un Mig sans le toucher. De plus, lorsque par miracle,
les obus de 30 mm trouvaient leur cible, le système de retardement
incorporé dans la tête explosive avait pour effet que la munitions
n'explosait qu'une fois ressortie de l'appareil ennemi.
Un nouvel alignement et une nouvelle munitions réglèrent le problème et les Migs commencèrent à tomber comme des mouches !
Médiocrité
du Radar Cyrano II
Le Cyrano II, et son système
de visée et de tir associé, était incapable de "locker"
une cible visible à l'oeil. De plus son système de refroidissement
au Fréon le rendait extrêmement difficile d'entretien. En
moyenne, toutes les cinq heures, il présentait une panne de fonctionnement.
Quant à ses performances air-sol, elles étaient déplorables,
tandis qu'il n'avait aucune capacité "look-down, shoot-down". Il
ne permettait donc pas, comme le prétendait Thomson CSF, de repérer
et de suivre une cible à 30 km de distant. Le radar Cyrano II
et son système de tir était même si médiocre
aux dires des pilotes israëliens, que ces derniers le remplacèrent
par un "contrepoids" dans le nez sur certains appareils. Les pilotes israëliens
trouvèrent une astuce : en bloquant le radar à un réglage
prédéterminé, ils pouvaient l'utiliser pour établir
la distance et la vitesse d'une cible éventuelle. Le combat devant
cependant se faire "à vue" et sans l'aide du système automatisé
de contrôle de tir (puisque pré-réglé...). C'est
une des raisons pour laquelle IAI développera une filiale (Elbit)
pour le développement de nouveaux équipements électroniques.
Une des premières réalisations de cette firme sera le radar-télémètre
Elbit 2001 pour le Kfir (C.1).
Ne pouvant faire confiance au Cyrano
mais aussi plus simplement n'ayant pas besoin d'un radar pour un appareil
utilisé surtout pour l'attaque au sol, il fut décidé
que sur le prochain Mirage (celui qui deviendra le Mirage 5)
le radar serait tout simplement retiré et remplacé par un
appareillage de télémétrie de tir. Mais c'est une
autre histoire ...
Curieusement, la France ne réglera jamais vraiment ses problèmes de radar non plus. Le IIIE, version électronique et optimisée pour l'attaque au sol du Mirage III, sera aussi équipée d'un radar Cyrano II avec, il est vrai, un radar Doppler de navigation en basse altitude corrigeant le défaut du Cyrano sur ce plan. Ce n'est qu'avec le Mirage F1 et le Mirage 50 qu'enfin on verra apparaître un radar multimodes performant : le Cyrano IV. Trop tard pour Israël qui entre-temps aura développé sa propre industrie aérospatiale avec des firmes comme IAI, Elta/Elbit et Raphaël. Les Kfirs C2, C7 et C10 seront donc équipés de radars haut de gamme n'ayant rien à envier aux meilleurs équipements américains. Elbit et IAI sont devenus les maîtres du marché de la modernisation des Mirage à travers le monde.
Le
faible emport d'armes
Le Mirage IIIC a une capacité théorique de 4 tonnes de charge sous ses ailes, en 5 points d'ancrage (un au centre du fuselage, deux sous chaque aile). Cependant la charge militaire réelle se limite à moins d'une tonne d'armes (bombes, roquettes) et encore, à la condition de ne pas emporter de missiles air-air. Typiquement une mission d'appui-feu comportera deux bidons d'ailes, deux bombes de 250 kilos en position centrale, les canons. Les curieux réservoirs combinés Matra JL-50 et JL-100 permettront d'emporter des roquettes de 68 mm en remplacement du bidon traditionnel, mais au prix d'une autonomie réduite. Les pilotes israëliens réaliseront cependant des merveilles avec un appareil qui n'était pas optimisé pour les missions qui lui ont été confiée. Le remplaçant naturel du Mirage IIICJ, le Mirage 5J, sera donc conçu dès le départ comme une plate-forme d'attaque au sol.
Afin de résoudre les problèmes
rencontrés mais aussi de faire face aux conséquences de l'embargo
imposé par De Gaulle, Israël entreprend le développement
de sa propre industrie aéronautique. L'embargo a provoqué
une pénurie de bidons d'ailes pour Mirage, IAI fonde IMI et charge
sa nouvelle filiale de réaliser un programme de remplacement. Or,
non seulement IMI remplacera les bidons, mais elle produira tout une gamme
de nouveaux types de bidons permettant l'emport d'armes diverses. Ceux-ci
seront vendus aux aviations du monde entier équipées de Mirage,
de Kfir et de Nesher.
Israël cherche donc à résoudre
son problème par trois projets spécifiques
Le Mirage IIICJ bénéficiera
surtout de l'acquisition par Israël des plans manquants du moteur
Atar 9C fabriqué sous licence par les Suisses (par Sulzer A.G.)
[2].
Ce moteur, plus puissant, qui équipe les
Mirage IIIE, Mirage
IIID, Mirage IIIBE, et les Mirage 5 (ce dernier, ne l'oublions
pas, un concept d'origine israélienne) procure une plus grande vitesse
tout en réduisant la consommation de carburant.
Il est important de noter que la volonté
de remotoriser avec le Atar 9C-3 a été prise parce que l'installation
du réacteur PW J-52-P-8A du A-4 Skyhawk sur les Smb-2 Sa'ar
modernisés avait procuré de réel avantages. Un Atar
9C-3 fabriqué par la nouvelle filiale de IAI, LAHAV, sera testé
(sous le nom de code Ra'am Mem) en septembre 1969 sur le Mirage
IIIBJ numéro (7)88 [3] prêté
à IAI afin de servir de banc d'essai.
Afin de réduire les coûts
et parce que l'on considérait que les Mirage IIICJ ne valaient
pas la peine d'un investissement supérieur, on procédera
simplement à la remotorisation avec des Atar 9C-3 pour la plupart
des IIICJ. L'autre avantage, bien qu'alors inconnu des israëliens,
c'était que les États-Unis ne pourraient mettre leur veto
à l'exportation des Mirage IIICJ remotorisés
(ce qu'ils feront pour tous les appareils équipés de J-79,
comme les Kfir). Il ne semble pas cependant que l'équipement
de détection et de contrôle de tir ait été modifié.
Comme on l'a vu plus haut, plusieurs Mirage IIICJ seront même privés
de leur radar. En 1971 les Mirage IIICJ survivants seront finalement
tous remotorisés avec des Atar 9C-3.
Ra'am Aleph
Nom de code du projet commencé
quatre mois avant Ra'am Mem. Il devait aboutir au développement
du Kfir qui était vu d'abord et avant tout comme une extension
du Nesher avec le J-79. Ce projet regroupe tous les appareils ayant
servis au développement. Le premier Nesher modifié
aux normes Ra'am Aleph, le #588, servira de banc d'essai jusqu'à
sa perte en vol, le 25 mai 1975. Les tests effectués avec le Ra'am
feront évoluer le Kfir (qui dans sa version initiale était
réalisé à partir de cellules de Nesher), vers
sa version C.2 (Canards etc.).
Ra'am Mem
Nom de code du projet visant à
camoufler la remise à neuf et la remotorisation des IIICJ ainsi
que le développement du Nesher.
Afin d'éviter de provoquer le
retrait du soutien très discret qu'effectuait Dassault pour
la remotorisation des IIICJ et le développement de la version Israélienne
du Mirage 5J, le Nesher, IAI reçoit
un Mirage IIIBJ pour les tests de remotorisation avec la copie du
réacteur Atar 9C-3 (SNECMA étant une compagnie d'état
ne pouvait se permettre la même "collaboration officieuse" que Dassault).
Ce projet ultra secret sera connu sous le nom de code Ra'am Mem.
C'est pour ce projet que IAI fonde sa filiale Lahav, basée dans
un hangar reculé et très secret dont l'accès se fera
sur la base du "besoin de savoir".
Par la suite ce Mirage IIIBJ (le #788) poursuivra sa carrière de banc-d'essai pour le projet d'étude Ra'am Aleph visant à développer un nouvel avion. La cellule du Mirage IIIBJ 788, louée à IAI en avril 1969, sera équipée d'un moteur GE J-79 modifié et volera en septembre 1970 pour la première fois. Il prendra la désignation Technolog. Après des essais divers et la modification progressive de la cellule du IIIBJ, le Technolog sera rebaptisé Kfir TC.
Toujours dans un but de désinformation,
et afin de camoufler le projet Ra'am Aleph (futur Kfir), le Mossad réussit
une opération de désinformation majeure. Aujourd'hui encore,
plusieurs spécialistes pensent que des Mirages IIICJ auraient
été remotorisés avec des J-79 et qu'ils auraient même
combattus lors de la Guerre du Kippour en octobre 1973. Ce vaste complot
a créé de toute pièce une version du Mirage IIICJ
qui n'a
jamais existée : le Arak ("Tonnerre").
Le Mirage espion : Mirage IIICJ(R)
Israël ne disposant pas de Mirage
IIIR, deux Mirage IIICJ (AMD # 34 et 60) furent modifiés
par l'ajout d'un nez de reconnaissance [photo] et sont toujours en service
au sein de l'escadrille 101 (la plus célèbre de toute l'armée
de l'air Israélienne). Cela allait permettre aux stratèges
de disposer d'une plate-forme de reconnaissance rapide jusqu'à l'arrivée
d'appareils plus modernes (comme les F-16).
Après s'être couvert de
gloire au sein de l'armée de l'air israélienne, le Mirage
IIICJ modernisé va être lentement retiré des unités
de premières lignes. Après plus de 20 années au service
de l'un des états les plus menacés au monde, le Mirage
IIICJ sera définitivement retiré.
C'est au cours de cette période
qu'un Mirage IIICJ battra un ultime record : celui de la durée
d'une poursuite en rase-mottes. En effet pendant plus de 8,5 minutes, dans
un dédale de canyons et de montagnes, un Mirage IIICJ poursuivra
un Hawker Hunter Jordanien jusqu'à ce que ce dernier soit
abattu.
Quelques victoires ... | ||
Date | appareil abattu | nationalité |
19 avril 1974 | 2 Mig 21 | Syrie |
29 avril 1974 | 4 Mig 21 | Syrie |
27 juin 1979 | 1 MiG-21 | Syrie (1ère victoire du Kfir) |
Le 18 décembre 1982, après la désastreuse campagne aérienne des Malouines, l'aviation argentine reçoit 20 Mirage IIICJ modernisés et 3 Mirage IIIBJ. Aujourd'hui, en 1998, 18 des Mirages IIICJ devenus les Mirage IIICJ/A, sont toujours actifs sur la base aérienne de El Plumerillo (4ème brigade aérienne) au sein du groupe de chasse numéro 4, tandis que les IIIBJ ne sont plus en état de voler. Ils rejoignent ainsi d'autres appareils israëliens acquis en 1978 en raison des menaces de guerre avec le Chili au sujet de quelques îles de l'archipel Beagle : les IAI Nesher, rebaptisés "Dagger A et B", depuis modernisés sous l'appellation "Finger III A" et "Finger III B".
Au dessus du Front de SyrieCol. Konstantin
Vasilyevitch Sukhov
À 14:00, l'artillerie
et l'aviation des pays arabes effectue des bombardements sur les positions
israéliennes. À 15:00 c'est l'infanterie qui monte à
l'assaut.
Au cours de cette première
heure du conflit, des appareils de l'aviation syrienne attaquent divers
objectifs :
* Le centre de commandement et de contrôle de l'aviation israélienne à Khevron (par 12 Su-20 et 8 Migs 21)
* Trois sites de radars et d'observation (par 20 SU-7B, 16 Migs 17 et 6 Migs 21)
* Trois points d'appui fortifiés sur le Plateau du Golan (par trois groupes de 8 à 10 Migs 17 escortés de Migs 21).
* Un assaut héliporté
d'un commando syrien sur Mil-8 permet de capturer un centre de brouillage
radar sur le Mont Jebel-Sheikh.
Au cours de cette journée
et en raison de conditions météorologiques adverses, l'aviation
syrienne n'effectue que 270 sorties. Un appareil israélien est perdu
ainsi qu'un syrien.
Des groupes de 6 à 12
SU-20,
SU-7B
et Migs 17, escortés de 4 à 6 Migs 21 chaque,
ont été utilisés pour l'appui-feu et l'attaque au
sol les 6 et 7 octobre. Quelquefois l'escorte de chasseurs n'accompagnaient
les avions qu'à leur retour. Par exemple, le 7 octobre, deux sections
de Migs 21 décollent de la base aérienne de Nasriye
afin d'escorter des SU-7B de retour de mission. Ces groupes n'étaient
pas contrôlés centralement. L'altitude de croisière
se situait aux alentours de 2000 à 3000 mètres avec une formation
de combat "en colonne de sections". Suivant les instructions du CGI, les
Migs quittent la zone de patrouille pour se diriger à la
rencontre de la première section de SU-7B. Peu après,
le Lt. Sukes, leader de la première section de Migs 21, aperçoit
un groupe de chasseurs adverses volant selon la même disposition
mais en sens inverse. Il croit voir une paire de
Mirage III, il
s'agit d'un groupe de quatre !
Sans hésiter, et surtout
sans prévenir le reste de sa formation de 8 Migs 21, le Lt.
Sukes effectue une manoeuvre à haut-G pour se positionner sur les
Mirages.
Sa manoeuvre a pour effet de briser la cohérence de son unité
: les Migs vont donc se battre sans coordination.
Cependant le Lt. Sukes réussi
à tirer un Atoll-2 sur un des Mirages. Le réacteur
de ce dernier est touché et le Mirage explose. Aucun parachute
ne fut signalé. Par la suite le Lt. Sukes fouille le secteur et
ne trouve plus personne : ni ennemi, ni ami. Un peu plus tard, le Lt. Sukes
rejoint sa base.
Le leader de la seconde paire
de Migs, le Lt. Dauvara, ayant perdu le contact visuel avec Sukes,
détecte une autre paire de Mirage III volant vers lui et
depuis la gauche à un angle de 30o . Les pilotes syriens font alors
une manoeuvre brutale qui ne résulte en rien d'autre qu'un G-Lock
(ou "voile-noir") pour chacun. Ayant complété cette manoeuvre,
les deux Migs 21 se retrouvent dans l'hémisphère arrière
des Mirages à environ 600 à 800 mètres. Le
leader pressa le commutateur "feu" sur son manche à balai mais,
dans l'énervement, pas assez longtemps pour que le missile s'active.
Son ailier, le Lt. Dibss attaque le second Mirage avec un Atoll
et l'abat. Le Mirage de tête qui a survécu à
l'attaque du Lt. Dauvara allume la "Gamelle" et part en spirale vers le
sol pour décrocher les Migs. Il y parvient et les deux
Migs
retournent à la base avec des réservoirs vides.
Quant à la seconde section
de 4 Migs-21, ils rencontrent une autre section de Mirages
à 3000 mètres et les engagent en combat tournoyant horizontal.
Au cours de ce combat, la section de Migs se divise en deux paires
agissant individuellement. Les Syriens ne réussirent pas à
se positionner convenablement pour un tir de canon ou de missile. N'ayant
pas rencontré le succès, et sans l'autorisation de leur leader,
la seconde paire de Migs rompt le combat et retourne à leur
base. Le chef de section et son ailier poursuivent leur combat. Alors que
les réserves de carburant descendent à 500 litres, ils plongent
vers le sol et amorcent une approche vers la base la plus proche : Bley.
Cependant, à cause du
manque de coordination entre les messages du Centre de contrôle aérien
et une ordre prématuré demandant le changement des codes
IFF (Identification Friend Foe), le service de défense antiaérienne
de la base de Bley les pris pour des appareils israéliens. Un Mig
est abattu par un missile sol-air, et l'autre par l'artillerie antiaérienne.
Heureusement les deux pilotes peuvent s'éjecter.
Le 10 octobre 1973, une section
de Migs 21, dirigée par le Capitaine Morris, décolle
de la base de Nasriye afin d'effectuer une patrouille entre 4000 et 6000
mètres. Le leader détecte deux Mirages IIICJ (agissant
comme "plastron"), volant devant et vers eux à 3000 mètres.
Le Lt. Khadra, leader de la seconde
paire de Migs-21 dans la formation, détecte au même
moment un groupe de Mirage IIICJ (le groupe d'attaque principal
dont le "plastron" essayait de cacher l'existence) qui volait derrière,
et plus bas, à environ 1000 mètres dans une formation "en
échelons". Sans avertir son supérieur commandant la section,
le Lt. Khadra et son ailier tournent brutalement vers les Mirages par derrière
et par en haut [N.D.T. : la position la plus avantageuse, il va sans dire].
À une distance entre 800 à 1000 mètres, les deux Migs
lâchent une paire de missiles Atoll simultanément, abattant
les deux Mirages IIICJ les plus proches. Dans le même élan,
ils réussissent à poursuivre leur approche et lancent deux
autres missiles qui font mouche. Deux autres Mirages s'abattent
en flamme. Il faut noter que cette attaque s'est effectuée dans
les meilleures conditions possible : une rapide approche par l'arrière
et par le haut, l'attaque des deux Mirages les plus proches, puis
les deux autres. Le Lt. Khadra sera par la suite décoré.
Au même moment, les deux
Mirages
IIICJ attaqués par l'autre paire de Migs, commençaient
des manoeuvres, principalement au plan horizontal. Les pilotes syriens
ne purent se placer en position de tir pour leurs missiles ou leurs canons.
Alors qu'il ne leur restait plus que 800 litres de carburants, les deux
Migs décrochent à la vitesse maximale, plongent vers
le sol et rejoignent leur base.
À partir du 11 octobre,
les chasseurs arabes commencent à engager leurs adversaires de plus
en plus loin de leur base de départ. Cette journée restera
la meilleure de toute la guerre pour l'aviation syrienne. Des cinquante-six
appareils hébreux abattus, les Migs 21 en ont eu dix, sans
perte pour eux-mêmes [N.D.T. : cela va changer...] Néanmoins,
un certain nombre de combats, particulièrement entre le 7 et le
17 octobre, finissent en défaite pour les Syriens. Une analyse révèle
que 60% de ces échecs sont dus à des manquements au niveau
de l'entraînement tactique.
Les combats étaient souvent
effectués par des groupes de 30 à 60 avions, à des
altitudes variant de 50 à 6000 mètres, à des vitesses
allant de 200 à 1500 km/h avec des charges jusqu'à 9G. En
règle générale, ces vols étaient caractérisés
par la manoeuvrabilité et l'éloignement des sites de SAMs.
Plus souvent qu'autrement, un combat débutait par la rencontre des
"plastrons" suivis par des manoeuvres au plan horizontal la plupart du
temps sans tenir compte de la présence potentiels d'appareils ennemis.
En utilisant un "plastron", les israëliens essayèrent de disperser
les formations de combat des Syriens, et lorsque ceci échouait,
les entraînaient dans une poursuite.
En faisant cela, une situation
favorable se créait pour le groupe d'attaque réel, qui était
souvent plus bas que le groupe de diversion (les "plastrons") et hors de
vue des postes d'observations syriens. Grâce à une approche
furtive, les appareils israëliens du groupe principal pouvaient attaquer
par surprise des objectifs syriens fixes. Lorsque ces manoeuvres de diversion
échouaient, les appareils israëliens essayaient de rompre le
combat et évitaient la confrontation. Malheureusement, les Syriens
qui désiraient utiliser les performances avancées du Mig
21, négligèrent la tactique et souffrirent en conséquence
des pertes qui auraient pu être évitées.
Par exemple, le 16 octobre, une
paire de Migs 21 décolle de la base de Khama et se positionne
en circuit de patrouille à 4000 mètres proche de la ville
de Tartus. À cause d'un brouillard très dense, la visibilité
n'excédait pas cinq à six kilomètres. Tout d'un coup
le leader de la patrouille détecte un F4E Phantom isolé
(un "plastron", comme d'habitude) effectuant un tournant à gauche
à faible vitesse, à environ 2 à 3 kilomètres.
Le pilote du F4E provoquait délibérément les
Syriens et y réussit. Les deux Migs 21 se débarrassent
de leur réservoir de carburant auxiliaire et, sans plus évaluer
la situation générale, allument la "Gamelle" (postcombustion)
et se lancent directement à l'assaut. Le premier missile Atoll,
lancé par le leader depuis une grande distance, manque son objectif.
Alors que leurs vitesses et leurs caps respectifs les faisaient s'approcher
rapidement, le leader syrien découvre tout à coup un second
F4E
qui terminait une attaque (il venait d'abattre le Mig de son ailier, qui
s'éjecta). Il lance son dernier missile vers le F4E sur lequel
il avait déjà tiré et le manque encore. Au même
moment son réacteur cesse subitement de fonctionner, mais, lancé
par sa vitesse et sa trajectoire, réussi à poursuivre son
approche et tirer environ quatre rafales de son canon de 23 mm à
300 ou 400 mètres. Les obus atteignent l'extrémité
de l'aile du F4E, provoquent un incendie et le conduisent tout droit
à la mer dans un léger mouvement vers la droite. Le réacteur
du Mig repart à 1500 mètres et il peut ainsi atterrir à
la base.
En réalité l'abattage du F4E ne sera pas confirmé et un Mig 21 sera tout de même perdu.
Quelques notes sur IAI
IAI B'Arak ou Arak ("Tonnerre")
Nom attribué à un projet fictif de désinformation
visant à faire croire à l'existence de Mirage IIICJ remotorisés
avec des réacteurs GE J-79.
IAI Technolog, alias Kfir TCMirage IIIBJ # 788, d'abord
motorisé avec le Atar 9C-3, puis avec un J-79. Prototype of the
Kfir, il prend le nom de Technolog, puis de Kfir TC.
IAI Namer
Développement du Kfir (version C.10 ou Kfir 2000) avec un
nez plus long, un système de ravitaillement en vol, un radar Elbit
2032, une canopée avant monopièce, etc. Les Atlas Cheetah
"C" Sud-Africains seraient des Namers sous license.
IAI Nesher,
Fruit du Projet Ra'am Mem. 51 Nesher monoplaces et 10 biplaces
seront construits entre 1971 et 1974. Les survivants seront par la suite
revendus à l'Argentine sous le nom Dagger A et Dagger B avant d'être
modernisés par IAI et rebaptisés Finger III A et IIIB
Projet Ra'am Mem
Nom de code du projet et des normes de développement pour
à la fois la remotorisation des IIICJ avec des Atar 9C-3 et la fabrication
du Mirage 5J Nesher.
Afin d'éviter de provoquer le retrait du soutien très
discret qu'effectuait Dassault pour le développement de la version
Israëlienne du Mirage 5J, le Nesher, IAI reçoit un Mirage IIIBJ
pour les tests de remotorisation avec la copie du réacteur Atar
9C-3. Ce projet ultra-secret sera connu sous le nom de code Ra'am Mem.
C'est pour ce projet que IAI fonde sa filiale LAHAV qui sera basée
dans un hangar reculé et très secret dont l'accès
se fera sur la base du "besoin de savoir".
Par la suite le Mirage IIIBJ (#788) poursuivra sa carrière de banc-d'essai pour le projet suivant,
Nom de code du projet d'étude visant à développer
un nouvel avion. La cellule du Mirage IIIBJ 788, louée à
IAI en avril 1969, sera équipée d'un moteur GE J-79 modifié
et volera en septembre 1970 pour la première fois. Prendra par la
suite le nom de Technolog. Après des essais divers et la modification
progressive de la cellule, le Technolog sera rebaptisé Kfir TC.
Projet Ra'am Aleph
Nom de code du projet et des normes de développement du Nesher
J-79. Commencé 4 mois avant Ra'am Mem, il se poursuivra après
la fin de celui-ci. Le IIIBJ 788 sera le premier remotorisé avec
un J-79 (prenant le nom Technolog), puis le Nesher 588 qui volera
en janvier 1973. Après avoir rejeté une version améliorée
des normes Ra'am Aleph (nom de code Ra'am Bet), IAI poursuit la
recherche avec le Technolog et le Nesher Ra'am. Les Kfirs C.2, C.7 etc.
en seront le fruit.